Avenir radieux, une fission française Douarnenez


C'est le titre du spectacle créé au printemps dernier par Nicolas Lambert, deuxième volet après "Elf, la pompe Afrique" de sa trilogie : "Bleu, Blanc Rouge, l'a-démocratie »; construit pour l'essentiel autour de propos réellement tenus sur la question du nucléaire, il croise à un rythme époustouflant la parole de citoyennes et citoyens, militants ou pas, celle des « spécialistes » de l'atome comme les discours des politiques.

Inspirée de choses entendues lors de débats organisés par la Commission Nationale du Débat Public sur l'éventualité de construire une centrale EPR à Penly, la première partie du spectacle se présente comme une controverse entre le point de vue des citoyens, les inquiétudes des riverains ou des élus locaux confrontés aux projets d'implantation de sites nucléaires et les certitudes des promoteurs de la filière atomique: Dirigeants d'EDF ou d'AREVA, grands corps de l'Etat ou représentants de l'Autorité de Sureté Nucléaire qui montre... qu'elle n'a strictement aucune autorité! La juxtaposition des propos des uns et des autres engendre un humour décalé dans un exercice qui rappelle fidèlement ce qu'on peut vivre lors des réunions d'information qui accompagnent les enquêtes publiques.

La deuxième partie constitue, quant à elle, un raccourci saisissant de l'histoire du nucléaire en France depuis les lendemains de la seconde guerre mondiale. La succession de morceaux choisis des discours gouvernementaux, de Mesmer à Sarkozy en passant par Giscard d'Estaing et Mauroy, est entrelardée d'extraits d'une interview, pleine de cynisme, donnée à un journaliste allemand par Pierre Guillaumat; Guillaumat, un ancien des services secrets de la France Libre qui fut placé à la tête du CEA au début des années 50 pour contrer l'influence de « pacifistes » comme Joliot-Curie. La pièce nous rappelle fort justement que la course à l'atome s'est poursuivie quelque soit la couleur politique des dirigeants du Pays. Elle nous rappelle aussi le lien entre nucléaire civil et nucléaire militaire, le rôle de la France dans la prolifération nucléaire: aide à Israël, à l'Iran du shah (affaire Eurodif)... On y apprend ainsi que la décision politique de construire la bombe atomique fut prise, quasiment de manière inavouée, sous Mendès-France, même si c'est De Gaulle qui en fut le maitre d'oeuvre.

Au dela du contenu de la pièce, il faut saluer la performance d'acteur de Nicolas Lambert jouant tour à tour une multitude de personnages, avec, s'agissant de nos dirigeants politiques, une capacité d'incarnation plus vraie que nature. A saluer aussi, l'accompagnement musical à la contrebasse qui ponctue le jeu du comédien. Vraiment, un spectacle ludique et pédagogique comme on voudrait en voir souvent. Donné devant près de 400 personnes à Douarnenez, à 40 kilomètres de Plogoff, il n'aura pas déçu les spectateurs dont certains étaient trop jeunes pour avoir participé à une des rares luttes antinucléaires victorieuses de ce Pays.

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