Abdoulaye Wade, demal* !‏

Les Alternatifs soutiennent les aspirations légitimes des forces démocratiques et de la jeunesse sénégalaise et demandent le départ d’Abdoulaye Wade. Il est plus que temps d’en finir avec les vestiges de la France-Afrique, les gouvernements corrompus et les démocraties relatives.
On peut, de loin, voir dans les manifestations sénégalaises, de « malheureuses tensions » pré-electorales dans une démocratie africaine indépendante. Il s’agit en fait des perpétuelles convulsions qu’entraînent un système corrompu et autoritaire qui depuis un demi-siècle confisque la démocratie sénégalaise au profit d’une petite caste défendant les intérêts entendus d’une bourgeoisie compradore, issue du colonialisme français et de plusieurs décennies de françafrique.
Depuis l’indépendance du Sénégal, trois chefs d’état se sont succédés sur un modèle identique. Tous trois issus du même groupe politique, formés par l’état français et peu enclins à laisser le peuple s’exprimer.D’abord Léopold Sédar Senghor, le « grand poète », pour reprendre la formule passe-partout, qui de 1945 à l’indépendance fut député français avant de devenir le premier président sénégalais. Senghor, qui décida d’engager une politique de grands travaux de l’état sénégalais destinés à rendre le pays souverain autonome et moderne, reléguant une partie du territoire « hors de l’histoire », hors de l’industrialisation, de l’électrification, de la création de réseaux routiers, destiné à devenir le grenier –arriéré- du Sénégal ; Senghor qui laissa les confréries mourides s’imposer comme le groupe d’influence religieux incontournable au Sénégal ; Senghor qui réprima violemment les mouvements sociaux ; Senghor, surtout, qui défendit avec âpreté les intérêts de l’état français au Sénégal. Pendant 5 mandats, le vieux Senghor étouffa l’espace public sénégalais, omniprésent dans les quelques médias nationaux (tous aux mains de son parti), façonnant le « débat démocratique » à sa convenance. Lors de son 5eme mandat, Senghor démissionne, après avoir été réélu, pour se garantir que le pouvoir resterait dans de bonnes mains, loin des dangers des caprices du suffrage universel. Après 20 ans de pouvoir, Senghor place Abdou Diouf, son ancien directeur de cabinet, son ancien ministre, son ancien Premier ministre, premier secrétaire du même Parti Socialiste. Et à son tour Diouf va tenir le pays, ses syndicats, ses médias, ses institutions. Et toujours Diouf saura mater les mouvements sociaux, la contestation d’une société qui continue à ne pas changer, à museler les médias, à s’arranger avec le système électoral pendant 19 ans. Enfin, en 2000, il est battu par Wade, à la tête d’une large coalition anti-Diouf. Les Sénégalais espèrent enfin la rupture avec l’ancien monde. Mais qu’est-ce qui pourrait changer ?
Comme Senghor et Diouf, Wade a fait ses études en France. Il est issu du même mouvement politique. C’est Senghor qui lui avait demandé de créer un parti libéral, le Parti démocratique Sénégalais, parce que le poète Senghor, il était comme ça : c’est lui qui décidait quel parti devait exister ou non. Et Wade a été le fidèle perdant de chaque présidentielle (en 78, 83, 88 et 93), idiot du système Senghor. Jusqu’à ce que le Poulidor des présidentielles sénégalaises gagne à son tour.
Qu’importe que Wade, candidat libéral, fût porté au pouvoir par une coalition COMPORTANT des partis communistes et d’extrême-gauche. Qu’importe qu’il promit privatisations et interventionnisme de l’état d’un même mouvement, baisses des dépenses publiques et augmentations des investissements étatiques en même temps. Wade avait promis d’en finir avec la concentration du pouvoir dans un même camp.
Las ! Wade n’a fait que remplacer le quotidien pro-gouvernemental par un nouveau quotidien progouvernemental, la radio officielle par une autre radio, remplacer les obligés du PS par ceux du PDS, réprimer contestations et mouvements sociaux et mettre en concurrence les entreprises françaises et les entreprises chinoises et américaines pour continuer à solder les ressources sénégalaises aux profits de groupes étrangers et d’une poignée de Sénégalais.
Et comme les autres, Wade ne supporte pas l’idée de ne rester au pouvoir que 12 ans. Depuis des mois, il tente de modifier le système électoral, voire de placer son fils Karim comme successeur, de tout faire pour rester en place.
Malgré la vigueur des mouvements sociaux - santé, eaux, électricité, enseignement - depuis 2008, rien ne change et Wade prétend être réélu lors de l’élection présidentielle du 26 février 2012, malgré l’inconstitutionnalité de sa candidature, et en interdisant la candidature de Youssou N’dour, le chanteur sénégalais dont la popularité faisait craindre à Wade une défaite de taille. Les Alternatifs se joignent à la coalition des associations, syndicats et partis réunis au sein du M23, Mouvement du 23 juin, pour réclamer des élections transparentes et démocratiques et la fin des violences policières contre les manifestants.
Trois morts ça suffit ! Deux mandats c’est assez, Wade, dégage !
* « Wade, dégage ! » en Wolof

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